Dans mon entourage, les gens, unanimement et fermement, condamnent le racisme et l'intolérance. Mais c’est un fait, et sans doute une banalité de le rappeler, il y a un gouffre entre nos discours et nos pensées.
Un ami franco-iranien est invité chez des collègues catholiques pratiquants (dans le plus pur style versaillais). Au cours de la soirée, on lui demande quelle est sa religion, car on a entendu dire que son père était iranien. Lorsqu’il annonce qu’il est musulman en prenant soin de préciser, un brin provocateur, musulman chiite duodécimain, les hôtes croient bon de lui apprendre, pour preuve de leur ouverture d’esprit, qu’ils se sont rendus dernièrement au mariage d’un copain juif et que « c’était étonnant mais génial ». Le truc sans aucun rapport mais qui suffit à trahir un trouble émotionnel certain.
Tel est le pouvoir ambivalent du langage : il nous permet de dire ce qui n’est pas, de paraître tel que nous ne sommes pas. Pourtant, cette vérité que nous tentons désespérément de dissimuler à travers nos discours, pointe parfois inopinément le nez au détour d’une phrase, parfois d’un silence. Et c’est toujours un plaisir de voir la vérité s’entêter et finir par avoir raison de nous et de nos efforts pour la cacher.
Révélateur, en effet ! Au fait, en lisant cette anecdote, je me suis dis que dans cette situation, avec ma curiosité habituelle, ma réaction aurait sans doute été de lui demander des précision sur le chiisme duodécimain, les autres formes d'islam, etc.
Rédigé par : Account Deleted | jeudi 02 mars 2006 à 20:27