Il y a des infos auxquelles il est difficile d’échapper. Ainsi en va-t-il des conclusions du rapport annuel de la CNCDH sur le racisme, dont les medias se sont fait largement l’écho hier. D’après ce rapport, un français sur trois se dit raciste, soit une hausse de 25% depuis 2004. Dans le même temps, et de manière paradoxale, 2005 a vu une baisse de 38% des actes racistes.
Bon, tout ça, vous le savez déjà…En revanche, ce que les médias ne disent pas, c’est que contrairement à ce que tout le monde a l’air de penser, ce paradoxe n’a strictement rien d’étonnant. Car il se pourrait aussi bien qu’il ne fasse que se conformer à une vérité psychologique avérée, à savoir qu’une meilleure connaissance de soi va de pair avec le progrès éthique. Si j’arrive à reconnaître en moi un défaut, comme par exemple la colère, en cessant de considérer mes emportements comme les simples corollaires d’un tempérament emporté (« je ne suis pas en colère, je suis passionnée »), ce ne peut être que pour avoir déjà entamé un travail sur ma colère, ne serait-ce qu’en commençant par me regarder moi-même pour voir si les autres n’auraient pas, pour une fois et par le plus grand des hasards, raison. Et cette simple prise de conscience de ce défaut me permet de mieux maîtriser mon comportement.
Ainsi, reconnaître que l’on est raciste ne signifie pas nécessairement qu’on le soit plus qu’auparavant. Cela peut aussi être le signe que l’on se connaît mieux et qu’on est plus sensible au racisme; que là où l’on aurait vu auparavant un comportement naturel et normal, on détecte une forme de discrimination éthiquement condamnable.
Donc, contrairement à la CNCDH, je ne suis pas sûre qu’il faille nécessairement s’inquiéter de « l’augmentation du pourcentage de personnes qui s’avouent racistes ».
Bonjour !
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec votre théorie, aussi optimiste soit-elle.
Vous considérez le racisme comme un "défaut" et le comparez avec la colère. Or, la colère est un trait de caractère. Le racisme, lui, est une opinion. Et je ne suis pas certain que votre argumentation (brillante) puisse s'appliquer aux opinions.
Les gens qui se disent racistes ne voient pas ça comme un défaut. Si cette opinion etait "mal" selon eux... Alors ils en changeraient. On ne décide pas de notre caractère, on ne décide pas d'avoir un tempérament coléreux, mais par contre, on décide de ses opinions.
Je considère plus quelqu'un qui dit "je suis raciste", donc, malheureusement, comme une revendication plutot que comme un comportement qu'on souhaite combattre.
Ceci est sujet à débat, bien entendu. Tout dépend des cas, et si, au cours d'une discution, quelqu'un vous dit "en fait, oui, je dois admettre que je suis raciste", alors votre argumentation est correcte et cette prise de conscience est encourageante.
Mais ici, c'est un sondage, c'est à dire que ce n'est pas le contexte rêvé pour une prise de conscience de soi. Quelqu'un qui considère le racisme comme "mal", dans un sondage ou les questions se suivent et necessitent une reponse rapide, repondra "moi ? raciste ? non !" et ne cherchera pas à approfondir la question (meme s'il le voulait, il n'en aurait pas le temps...)
Au contraire, quelqu'un qui répond "oui" est soit quelqu'un qui le revendique, soit quelqu'un qui viendrait recemment de rentrer dans un processus de travail sur soi à ce sujet, comme vous l'avez decrit. Mais que 1 personne interrogée sur trois soit entrée en reflexion sur lui-même au sujet du racisme juste avant d'etre interrogé, cela fait une bien trop grosse coincidence pour que j'y prète crédit :)
Rédigé par : Yoxigen | vendredi 24 mars 2006 à 13:10
Je suis plutôt d'accord avec Yoxigen, je pense que si plus de personnes se disent (et non s'avouent) racistes, c'est qu'ils ont l'impression d'une certaine légitimité du racisme; peut-être parce que certains de nos hommes politiques a priori 'fréquentables', ont un discours qui conforte certaines personnes dans leur opinions racistes.
Rédigé par : jerry | vendredi 24 mars 2006 à 15:16
Bonjour, et d'abord, merci pour vos commentaires approfondis et toujours agréables à lire.
Je comprends bien votre position. Au fond, vous craignez que le fait que beaucoup de personnes affirment leur racisme, soit une manière de le revendiquer.
Il me semble que la confusion vient de ce qu'on ne précise pas ici ce qu'il y a derrière l'affirmation par laquelle une personne se reconnaît raciste. Est-ce qu'elle nous informe de ses opinions racistes, c'est-à-dire de son adhésion à une idéologique qui établit une distinction et une hiérarchisation entre les "races", comme d'autres ont pu à certaines époques se déclarer fascistes ? Dans ce cas en effet, je partage avec vous l'inquiétude et la crainte qu'il n'y ait dans cette affirmation une forme de revendication, du style "oui, je suis raciste, j'en suis fière, car c'est mon opinion et que mes opinions me sont chères", qui conduise naturellement à la banalisation d'une idéologie contraire au respect de la personne humaine.
Mais se dire raciste, c'est aussi reconnaître en soi une forme d'hostilité envers l'étranger. Dans ce cas, celui qui affirme être raciste ne plaide pas en faveur d'une idéologie, il décrit juste un état de fait, qu'il lui est d'ailleurs possible de déplorer : "oui, je sais, c'est mal, mais je dois bien reconnaître en moi des sentiments racistes".
D'où ma conclusion dans le billet : je ne dis pas qu'il ne faut pas s'inquiéter. Je dis seulement que l'inquiétude n'est pas nécessairement fondée, précisément parce qu'il est possible d'interpréter les résultats de cette étude autrement que de la manière dont tous les journalistes que j'ai entendus l'ont fait.
Ceux qui sont le plus racistes, au sens où ils éprouvent une hostilité envers les étrangers (il s'agit bien ici, Yoxigen, d'une tendance caractérielle et pas seulement d'une opinion) ne sont pas forcément ceux qui sont les plus à même de le reconnaître. Je souhaitais aussi proposer une solution face à la contradiction, qui semble avoir étonné tout le monde, entre une diminution des actes racistes et une augmentation de l'affirmation : "je suis raciste". Si les gens qui ont répondu qu'ils étaient "racistes" entendaient préciser qu'ils adhéraient à une idéologie, il est à craindre effectivement que dans l'avenir les actes racistes augmentent (car ce sont nos actes, plus que nos déclarations, qui témoignent de ce que nous sommes). Si tel n'est pas le cas, alors il nous faudra envisager d'autres conclusions :-)
Rédigé par : Steph | vendredi 24 mars 2006 à 17:57
Voilà un point de vue résolument optimiste.
Merci pour ce petit texte sur la colère qu'il conviendrait que je médite à l'occasion ;-)
Rédigé par : Mille Pattes | samedi 25 mars 2006 à 07:08
Cette conclusion très optimiste est un peu trop théorique, je pense. En effet, c'est chiffres doivent être pris dans un contexte, celui d'une France qui va mal. D'abord les problèmes dans les banlieues sont l'affirmation de ce malaise que certains laissent pourir.
De cela à découler une stigmatisation de ces jeunes que l'on a exclu et abandonné et dont après on exige un respect que l'on ne leur a pas donné. Les pré-jugés et la démagogie ont poussé à un sentiment de haine en vers c'est gens dont on a bêtement pensé qu'ils étaient étranger (alors que pas du tout). Ces raccourcis facile, notamment faient par les médias et certains politiques, ont légitimés une certaine forme de racisme et c'est ça le plus dangereux. Les pensées racistes s'affirment donc dans un pays qui les légitime (2 tiers des sondé comprennent certains comportements racistes).
Ce sondage est donc beaucoup plus flippant que vous pouvez l'affirmer.
PS: Prenons tous conscience et faisons du racisme (quel qu'il soit)l'ennemi de notre société.
Rédigé par : batty | samedi 25 mars 2006 à 20:19
Je pense qu'avant de débattre,il faut déja définir ce que signifie etre raciste au 21eme siecle. Dénigrer et rabaisser un individu à cause de sa couleur de peau ? Je doute que les 31 pourcent de francais se disant raciste dans cette étude du CNCDH pensent cela ! En effet,je songe plutot à un amalgame entre acte de vandalisme et étrangés.
Bref conclusion,31 pourcents des francais en ont assez de l'insécurité et s'imaginent que ce sont les étrangés qui viennent en France pour tout casser^^.
Rédigé par : Ed^^ | lundi 27 mars 2006 à 19:03